En colère contre Berlin et Bruxelles, les agriculteurs allemands descendent dans la rue

Depuis quelques années, les agriculteurs de l’Union européenne s’insurgent contre le programme « De la ferme à la fourchette » de l’UE, qui prévoit des réductions radicales (jusqu’à 50 %) de l’utilisation de pesticides et d’engrais, ainsi que la réduction des terres agricoles disponibles. Ce programme a déjà eu des conséquences politiques aux Pays-Bas, où les agriculteurs ont fondé un nouveau parti, le BBB, qui a été élu au parlement national il y a quelques semaines, après avoir fait son entrée au Sénat en mars. En Pologne également, le vote des agriculteurs a contribué à la victoire de l’alliance de l’opposition lors des élections nationales du 15 octobre (voir AS 42 / 23).

En Allemagne, les effets de la politique de Bruxelles ont également joué dans le récent éclatement de la coalition CDU-Verts au pouvoir dans l’État de Hesse, remplacée depuis par une coalition CDU-SPD qui a promis de défendre les intérêts des agriculteurs. En France, les organisations agricoles protestent contre la hausse des prix du carburant agricole et les restrictions sur l’utilisation des nitrates, avec des actions prévues en janvier. Outre la politique agricole imposée par Bruxelles, les agriculteurs d’Europe de l’Ouest et de l’Est craignent que l’entrée dans l’Union de l’Ukraine, grand producteur agricole, se fasse à leur détriment.

Si les agriculteurs allemands ont été relativement calmes ces derniers mois, pour diverses raisons, l’annonce choc de Berlin, la semaine dernière, de supprimer les subventions d’État au diesel agricole a déclenché une nouvelle vague de protestation. L’association nationale des agriculteurs allemands DBV a aussitôt organisé une manifestation le 18 décembre devant la porte de Brandebourg à Berlin, avec la participation de milliers d’agriculteurs, et de centaines de tracteurs. Sous le slogan « Trop, c’est trop ! Maintenant, c’est fini ! », ils ont exigé le retrait du projet du gouvernement. Faute de quoi, il y aura une « résistance massive » dès janvier, a averti Joachim Rukwied, président de la DBV.

Cette réaction a incité le ministre de l’Agriculture, Cem Ozdemir, des Verts, à prendre ses distances avec le gouvernement (dont il fait partie) et à accepter l’invitation à prendre la parole lors du rassemblement de Berlin. Dans l’émission matinale de la chaîne ARD, en opportuniste confirmé, Ozdemir a expliqué que, sans s’opposer en principe aux réductions, il comprend les inquiétudes des agriculteurs. Le « seuil de douleur » a été « dépassé », dit-il, sachant qu’il n’existe pas d’alternative au diesel agricole. Par ailleurs, le ministre des Finances, Christian Lindner, a déclaré qu’il serait prêt à rétablir les subventions et à trouver d’autres postes à réduire pour combler le trou béant dans le budget du gouvernement.

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