Jacques Cheminade : il faut changer les règles du jeu

Jacques Cheminade, président de Solidarité et Progrès en France, a rédigé le 26 avril cet éditorial pour le mensuel Nouvelle Solidarité, sous le titre “Guerre et paix”. Le texte intégral peut être lu ici

« Une seule question domine toutes les autres : voulons-nous arrêter la course vers une guerre mondiale ? L’horloge est à quelques secondes de minuit. La moindre erreur d’appréciation ou une provocation absurde suffiraient à déclencher l’impensable. Ceux qui survivraient à la première déflagration subiraient un hiver nucléaire qui les amènerait à dépérir dans des conditions atroces. Ceux qui haussent les épaules devraient savoir qu’en ne faisant rien, on se trompe toujours.

« C’est pourquoi les prochaines échéances électorales de 2024, en Europe comme aux États-Unis, devraient porter d’abord sur le désarmement nucléaire et le contrôle de toutes les armes offensives. La France, membre du Conseil de sécurité des Nations unies, doit se donner pour mission d’y faire entendre la voix des pays qui recherchent la paix par une politique de développement mutuel, qui sont la majorité planétaire. En s’inspirant de ce que fit Charles De Gaulle dans sa conférence de presse du 21 février 1966, en annonçant la sortie de la France du commandement militaire intégré de l’OTAN, puis le 1er septembre 1966, dans son discours de Phnom Penh condamnant la guerre américaine au Vietnam. (…)

« Il faut faire bien plus. Pour abattre le système financier de l’oligarchie dominante, qui porte la guerre car c’est la condition même de sa survie, il faut changer la règle du jeu. C’est dans ce but que nous participons aux conférences internationales de l’Institut Schiller, catalyseur entre forces apparemment opposées pour relever le défi de la paix. Car c’est à un niveau supérieur à celui des impérialismes, des colonialismes ou des néo-colonialismes que se trouve le dessein commun qui évitera à l’humanité de s’anéantir.

« Emmanuel Macron promeut un ‘sommet pour la paix’. Il déclare dans Le Parisien (24 avril) que ‘nous ne sommes pas partie prenante à cette guerre’ (en Ukraine). Il proclame en revenant de Chine que ‘l’Europe doit réduire sa dépendance vis-à-vis des États-Unis’, mais il ajoute : ‘Notre objectif, c’est (…) de ne pas permettre à la Russie de gagner’ et ‘que la guerre s’arrête au moment où les Ukrainiens seront en position de force’. Cela revient à continuer à exposer le peuple ukrainien au massacre. Car il s’agit en fait d’une guerre de l’OTAN contre la Russie dans laquelle nous autres, Européens, sommes tous les dindons complaisants de la farce. Et Macron ne remet pas en cause le mode de fonctionnement de l’OTAN planétaire définie en juin 2022 à Madrid.

« Oleksiy Danilov, du bureau présidentiel ukrainien, nous dit de son côté qu’un ‘règlement pacifique, dans les conditions actuelles, aboutirait à une paix russe’ et que ‘nous avons besoin d’armes et de munitions et non de négociations’. ‘Pas besoin de solution diplomatique’, renchérit le général Ben Hodges, ancien commandant de l’armée américaine en Europe. Des militaires expérimentés nous disent, quant à eux, qu’il faut laisser Poutine gagner car une puissance nucléaire ne peut pas perdre. C’est en effet probablement ce qui se passerait si on continuait à mener le peuple ukrainien à son suicide assisté. Je pense au contraire que notre défi est de sortir d’une vision géopolitique jouant un camp contre l’autre et de nous battre pour une nouvelle architecture internationale de paix par le développement et la sécurité mutuels. Les États-Unis possèdent des centaines de bases militaires et ont mené plusieurs dizaines de guerre depuis 1945. Ils devraient aujourd’hui en tirer les leçons car, comme nous nos colonies, ils les ont toutes perdues.

« Tous les partis politiques ont chez nous une part de responsabilité car ils ne relèvent pas d’abord le défi de la paix et de la casse sociale que porte l’économie de guerre dans laquelle nous sommes plongés.

« Les hommes préfèrent trop souvent aller à leur perte plutôt que de changer leurs habitudes. Changeons-les pour demeurer vivants et humains. »

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