Une politique énergétique qui tue : le cas de la Roumanie

Le Green Deal de l’Union européenne et ses prédécesseurs ont des effets particulièrement dévastateurs sur les pays d’Europe de l’Est, tant par la suppression progressive de l’exploitation du charbon que par l’obligation pour toutes les centrales électriques d’acheter des « certificats carbone » censés compenser la quantité de CO2 émise lors de la production. En effet, dans le cadre du système dit d’échange de quotas d’émission (ETS en anglais – une arnaque financière pure et simple), le prix de l’émission de CO2 dans les centrales électriques de l’UE est passé de 5 euros par tonne en 2016 à près de 40 euros aujourd’hui !

En Roumanie, qui n’a rejoint l’UE qu’en 2007, les centrales à charbon fournissent encore environ 25 % de l’électricité du pays, tandis que l’industrie houillère constitue la base de la vie économique dans différentes régions. Un aperçu, bref mais choquant, de la situation sur le terrain a été donné le 16 juin, dans le cadre d’un webinaire du Mouvement allemand des droits civiques Solidarité, par Alexandra Bellea, une militante de Solidarité & Progrès d’origine roumaine.

En 1989, la Roumanie comptait 23 millions d’habitants, elle pouvait se vanter de son activité industrielle et de son indépendance énergétique, a-t-elle expliqué. En 2021, la population n’atteignait plus que 19 millions, dont cinq travaillant à l’étranger, et la transition énergétique a privé le pays de son indépendance. Les « villes les plus dépeuplées sont celles des régions charbonnières » -et la situation ne peut qu’empirer vu la politique énergétique de Bruxelles.

L’hiver dernier, la centrale au charbon Mintia a été fermée complètement, « parce qu’elle ne répondait plus aux normes environnementales de l’UE et que les certificats de carbone l’avaient ruinée financièrement ». Comme la centrale fournissait également le chauffage urbain à quelque 4700 foyers de la ville, « tous ces habitants se sont retrouvés sans chauffage et sans eau chaude, alors que l’hiver est très froid dans cette région ».

Fin avril, conformément aux diktats de l’UE, toutes les centrales au charbon de Roumanie ont dû « débourser des millions d’euros pour acheter des ‘certificats carbone’. Certaines d’entre elles, qui n’avaient pas les moyens de le faire, doivent maintenant payer de lourdes amendes. Elles aussi risquent de faire faillite », y compris celle de Timisoara (où la révolution avait commencé en 1989).

Toujours en avril, des mineurs de la vallée de Jiu ont organisé une grève de plusieurs jours à la mine pour exiger le paiement de leurs salaires, suite à l’insolvabilité de leur employeur à force de payer les amendes et les frais imposés par l’UE. Par ailleurs, « les travailleurs des centrales électriques au charbon sont mobilisés depuis 19 semaines pour exiger de meilleures conditions de travail, sous le slogan ‘Arrêtez le génocide social dans le secteur de l’énergie’. »

Deux comtés de Roumanie seront particulièrement touchés par la fermeture des mines de charbon, Hunedoara et Gorj. « Une étude du département de recherches de l’UE prévoit une perte d’environ 25 000 emplois directs, mais au-delà, c’est toute l’économie de la région qui est basée sur le charbon. Que vont devenir ces gens, que devront-ils faire, devront-ils aller cueillir des asperges en Allemagne ? »
Le Green Deal de l’UE, a insisté Alexandra Bellea, est une politique délibérée de désindustrialisation et de dépeuplement. Il faut l’arrêter immédiatement.

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