Ukraine, UE, Allemagne : la liberté d’expression et l’Institut Schiller visés

Le Centre de lutte contre la désinformation (CCD) de Kiev a publié le 3 octobre une version augmentée de sa liste d’« orateurs qui promeuvent des récits en phase avec la propagande russe ». La liste originale identifiait plus de 70 personnalités internationales, accusées de contredire la ligne officielle de l’OTAN, les déclarant « terroristes de l’information » susceptibles d’être jugés comme des « criminels de guerre » (voir AS 31-39/22). Sur leur nouvelle liste, arrive en première position la fondatrice de l’Institut Schiller, Helga Zepp-LaRouche, suivie de nombreux intervenants à des conférences de l’IS. Zepp-LaRouche et le porte-parole de l’IS, Harley Schlanger, figurent également sur la liste encore plus sinistre d’ennemis « à liquider » établie par le site Myrotvorets.

De son côté, l’Union européenne a apparemment dressé ses propres listes. Lors d’une conférence de presse tenue le 28 septembre, le chef des Affaires étrangères de l’UE, Josep Borrell, a annoncé que dans le cadre des nouvelles sanctions, « nous continuons également à cibler les acteurs qui diffusent de la désinformation sur la guerre – notamment ceux qui diffusent de fausses informations et donnent des fonds aux zones occupées par la Russie » en Ukraine.

Selon Borrell, des opérations de ciblage seraient en cours dans de nombreux pays de l’UE. Le modus operandi pour l’Allemagne a été dévoilé dans un dossier compilé par le média alternatif Nachdenkseiten, dont la première partie a été publiée le 29 septembre. Il s’intéresse surtout à un groupe de coordination centralisé, mis en place au sein du gouvernement allemand en juin dernier pour dissuader la diffusion d’informations indépendantes sur la Russie. Ce dossier s’appuie sur un document interne du gouvernement allemand remis par un lanceur d’alerte.

Daté du 27 juin, ce document intitulé Actions menées par des agences et des autorités contre la désinformation relative à la guerre RUS contre UKR, précise l’implication de plusieurs entités officielles : ministère de l’Intérieur, ministère des Affaires étrangères, Bureau fédéral de presse et ministère de la Défense. Identifié comme le noyau central des activités de propagande de l’État, le ministère de l’Intérieur rédige des rapports de situation sur la Russie et l’Ukraine toutes les deux semaines. Un « plan de résilience » en dix points prévoit la diffusion d’informations contrôlées par le gouvernement auprès des institutions (dont le Bundestag), des médias et même des écoles primaires afin de vacciner les enfants contre la « désinformation ».

Le ministère des Affaires étrangères est chargé d’élaborer, en collaboration avec des experts américains, un « document évolutif » qui « déconstruit/démystifie les récits russes classiques et actuels sur la guerre en Ukraine ». Il coopère également avec l’Office fédéral de la presse (BPA) pour offrir des stages et autres formations sur la ligne à suivre. Compte tenu de ce dispositif, la similitude des informations dans la quasi-totalité des médias allemands n’est pas surprenante. Pas plus que ne le sont leurs attaques contre ceux qui expriment une opinion contraire.

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