Quand Berlin creuse sa propre tombe

L’agressivité du gouvernement allemand envers la Russie et la Chine ne cesse de monter ces dernières semaines. Pour commencer par le ministre de la Défense, Boris Pistorius (SPD), il a déclaré le 21 avril qu’il était tout à fait justifié que l’Ukraine lance des attaques contre le territoire russe, par exemple celles de plus en plus fréquentes effectuées à l’aide de drones de combat. Et dans un discours au Bundestag le 19 avril, il a proposé que l’Occident s’en prenne à la présence russe en Afrique. Par ailleurs, la ministre de l’Intérieur, Nancy Faeser, vient d’expulser 20 diplomates russes accusés, selon Focus, de vouloir recruter des informateurs allemands.

Quant à la ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock (Verts), elle a manifestement choisi d’être provocatrice pendant et après sa visite en Chine il y a deux semaines, la qualifiant de « rival systémique », qui se comporte de plus en plus agressivement sur la scène internationale. Après une rencontre surprise avec des dissidents chinois, elle s’est déclarée « plus que choquée » par les politiques répressives de la Chine sur le plan intérieur. Concernant Taïwan, elle a implicitement attaqué l’approche d’Emmanuel Macron, en mettant en garde Beijing contre le « scénario de l’horreur » d’un conflit militaire (voir AS 16/23).

Les Verts, comme nous le savons, sont devenus le fer de lance de l’OTAN et du « parti de la guerre » transatlantique en Allemagne, tout en prônant la rupture des relations commerciales avec la Russie et la Chine (au profit des États-Unis) et la destruction délibérée de l’approvisionnement énergétique du pays. En somme, une politique qui condamne à mort la souveraineté de l’Allemagne et son économie autrefois puissante.

Il reste à savoir si cette orientation politique, que rejette une majorité de citoyens, parviendra à se maintenir jusqu’à la fin du mandat du gouvernement actuel, ou si une révolte constructive conduira au renversement de la coalition à temps pour éviter des dommages irréparables. Jamais un gouvernement allemand n’a été aussi impopulaire, les derniers sondages indiquant un taux d’approbation ne dépassant pas les 42 % des électeurs. Le SPD et les Verts ne sont plus qu’à 18 % chacun, tandis que le FDP s’enlise à 6 %. Dans l’opposition, la CDU a à peine amélioré sa cote pour atteindre 31 %. En revanche, le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) monte à 15 %, vu la résonance auprès des électeurs de plusieurs de ses positions. Il s’oppose au soutien à l’Ukraine au détriment des relations avec la Russie, demande une enquête exhaustive sur le sabotage de Nord Stream et la réparation des gazoducs, et appelle à un retour à l’énergie nucléaire.

Cependant, le « parti » le plus fort est celui des abstentionnistes, qui atteint désormais 40 %, surtout en raison de la défection des électeurs traditionnels du SPD. Il manque toutefois une force à même de transformer ce vide politique grandissant en un facteur politique réel, peut-être sous forme d’un nouveau parti. La volonté de discuter de perspectives communes avec l’Institut Schiller, mise en évidence lors de sa conférence des 15 et 16 avril, indique comment ce vide peut être comblé (voir ci-dessous).

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