Petit rappel historique : pourquoi les architectes de la Guerre froide voulaient la mort de Kennedy

Au moment où le danger de guerre nucléaire entre les Etats-Unis et la Russie s’amplifie, il est utile, et pas seulement pour les Américains, de considérer l’approche adoptée à l’époque par le président américain John F. Kennedy (janvier 1961-novembre 1963) – et qui lui a sans doute coûté la vie.

Kennedy avait compris que la menace d’annihilation nucléaire, devenue réelle lors de la crise des missiles de Cuba, rendait impératif un changement dans les relations entre les deux grandes nations. Il savait que son homologue soviétique, Nikita Khrouchtchev, subissait de la part des « fauteurs de guerre » de son propre camp les mêmes pressions que lui-même de son côté. La mentalité de la Guerre froide, dominante chez la plupart de ses conseillers militaires, diplomatiques et des services de renseignement, s’était ancrée également dans l’esprit de l’électeur américain. Aussi le président Kennedy se demandait-il s’ils accepteraient une ligne moins « dure » à l’égard du communisme, ou si les faucons parviendraient à torpiller une politique de détente.

JFK atténua les tensions avec l’URSS en utilisant les voies officieuses mises en place pour résoudre pacifiquement la crise des missiles de Cuba et parvint à conclure le traité d’interdiction des essais nucléaires. Mais il hésitait à affronter plus directement et publiquement ceux pour qui parler de paix s’apparentait à une politique d’« apaisement » vis-à-vis du communisme. En effet, la pression augmentait à l’approche des élections présidentielles de 1964, et à cause de la difficulté croissante de continuer à soutenir le gouvernement du Sud-Vietnam sans un déploiement militaire beaucoup plus conséquent.

JFK était convaincu qu’on lui mentait sur la possibilité d’un succès militaire au Vietnam et que les Etats-Unis ne devaient pas s’impliquer davantage dans cette guerre au nom d’un anticommuniste rigide. À l’automne 1963, il commença donc le désengagement des Etats-Unis et le 11 octobre, il promulgua le mémo 263 sur la Sécurité nationale, autorisant le retrait de 1000 militaires américains avant la fin de l’année, et de tous les effectifs avant la fin de 1965.

Mais les implications politiques de cette décision lui posaient problème. Selon les documents rassemblés par James Douglass dans JFK and the Unspeakable : Why He Died and Why It Matters (JFK et l’indicible – Pourquoi Kennedy a été assassiné), Kennedy était obsédé par la résolution de ce dilemme. Il avait confié à son vieil ami Charles Bartlett : « Nous n’avons aucune chance de l’emporter là-bas. (…) Ils [les Vietnamiens] vont nous virer de là pratiquement à tout moment. Mais je ne peux pas abandonner un territoire comme celui-ci aux communistes, puis me faire élire par le peuple américain. »

Que nous apprend cette lutte menée par JFK pour transformer la politique étrangère américaine, à la lumière de la menace existentielle qui pèse sur nous aujourd’hui ? En 2004, lors d’une conversation sur l’assassinat de Kennedy, Lyndon LaRouche confia à ses associés qu’à l’époque, l’erreur du jeune président avait été de mener une « guerre de cabinet », dans l’idée qu’il pourrait soit rallier les faucons à son plan, soit les mater jusqu’après l’élection de 1964 et organiser le retrait ensuite. Selon LaRouche, c’était un piège qui rendait la guerre inévitable, et sa chute également. Il aurait dû au contraire utiliser sa position de Président pour amener la population à comprendre le piège de la logique de la Guerre froide, et corriger l’erreur commise par l’ancien président Harry Truman en reniant l’alliance de guerre avec l’URSS et fourvoyant les Etats-Unis dans la division du monde en deux empires, voulue par Churchill.

Evidemment, Joe Biden n’est pas John Kennedy et jusqu’à présent, aucun candidat à l’élection présidentielle américaine de 2024 n’a fait preuve des qualités requises pour un homme d’État. D’où la nécessité que les « patriotes et de citoyens du monde » construisent un mouvement de paix crédible, basé sur la réalisation des objectifs communs de toute l’humanité, comme le propose l’Institut Schiller.

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