Le projet de Washington et Bruxelles visant à concurrencer l’ICR est condamné d’avance

Le 18 novembre à Bali, en marge du G20, le président américain Biden et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avaient réuni quelques chefs d’État et de gouvernement en vue de lancer le projet du G7 baptisé Partenariat mondial pour les infrastructures et les investissements (PGII en anglais), visant à rivaliser avec l’Initiative chinoise une ceinture, une route (ICR). Le budget de 600 milliards de dollars alloué au projet peut sembler impressionnant, mais en fin de compte, ce n’est que du vent. Comme son prédécesseur européen « Global Gateway » ou le programme américain « Build Back Better », le PGII repose sur l’illusion de réussir à mobiliser des capitaux privés pour financer des investissements en infrastructures fonctionnant selon la « loi du marché », et ainsi concurrencer la Chine.

Signe de l’attractivité du PGII pour les pays en développement : seules l’Inde et l’Indonésie participaient à la réunion de Bali, aux côtés des pays du G7, moins l’Italie.

Il y a des années que l’Occident tente de contrer la Chine dans ce domaine, affirme un article paru dans Politico. « Si le plan chinois s’est rapidement concrétisé sous forme d’acier et de béton, la réponse de l’Occident à l’Initiative une Ceinture, une Route reste vague », constate-t-il.

On comprend mieux pourquoi le PGII ne marchera pas en consultant l’analyse du Global Gateway effectuée par le Réseau européen pour la dette et le développement (Eurodad). Son rapport au titre éloquent, « L’empereur est nu : quoi de neuf dans le Global Gateway de l’UE », souligne : « Il n’y a pas d’argent frais alloué au Global Gateway et son approche apparaît plutôt comme une tentative de redorer des projets existants, ce qui suscite des inquiétudes quant au détournement des ressources de développement déjà rares. »

Toujours selon ce rapport daté de septembre 2022, les politiques proposées « servent principalement les intérêts du secteur privé » et ne sont pas centrées sur la lutte contre la pauvreté. Le Global Gateway compte sur la mobilisation des ressources d’investisseurs privés qu’il pourra ensuite optimiser. En outre, la géopolitique du projet « repose sur la promesse de financer une initiative qualitativement supérieure à l’Initiative une ceinture, une route dirigée par la Chine. (…) Bien que les documents officiels sur le Gateway ne mentionnent pas explicitement la concurrence avec l’ICR, les implications sont claires. La Commission présente le Gateway comme une initiative supérieure, ancrée dans les valeurs démocratiques, et une approche éthique du financement des infrastructures fondée sur la durabilité et la bonne gouvernance. »

Concrètement, le Global Gateway vise à mobiliser 300 milliards d’euros pour des investissements dans des infrastructures, somme à laquelle l’UE parvient en calculant un ratio de levier approximatif de 10. « Cela signifie que, pour chaque euro de financement public, 10 euros seront mobilisés en financement privé. Ce montant est basé sur les activités du FESD+ [Fonds européen pour le développement durable plus], qui n’en sont encore qu’à leurs débuts et qui ont été mises en cause par la Cour des comptes européenne pour avoir été entourées de ‘beaucoup d’espoirs et d’attentes’ mais moins de réalité. »

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