Un nouveau port maritime pour la Russie, le premier depuis des décennies

Les sanctions occidentales ont incité la Russie à se concentrer sur de grands projets de transport qu’elle avait jadis hésité à entreprendre. En mai donc, le gouvernement a émis une directive visant à réorienter les voies de transports vers l’est et le sud, plutôt que vers l’Europe. Un élément clé de cette réorientation est l’achèvement du Corridor international de transport nord-sud (INSTC) qui part de Saint-Pétersbourg, sur la Baltique, traverse la mer Caspienne pour rejoindre l’Iran et, de là, s’étendra jusqu’au port indien de Mumbai. Ce projet, qui servira à intégrer toute l’Asie centrale, figurait à l’ordre du jour du Sixième sommet de la mer Caspienne organisé par le président turkmène Serdar Berdimuhamedov, avec la participation de Vladimir Poutine et de ses homologues d’Azerbaïdjan, d’Iran et du Kazakhstan.

Du fait que Saint-Pétersbourg et Kaliningrad (également sur la Baltique) sont vulnérables aux sanctions occidentales et à d’autres mesures antirusses, Moscou a décidé de déplacer l’extrémité nord du corridor vers un nouveau port arctique sur la péninsule de Kola, à Mourmansk. Lors d’une réunion le 20 juin avec le gouverneur de la région, Andrey Chibis, le président Poutine a confirmé qu’il s’agira du plus grand port commercial du pays, et du premier construit par la Russie depuis des décennies.

Le nouveau port se trouve à Lavna, sur la rive occidentale de la baie de Kola et, en raison de sa grande profondeur, ne connaît pas le gel. Le projet, lancé il y a plusieurs années pour transporter du charbon vers l’Allemagne, avait été remis en question en 2020, après la décision de Berlin de sabrer ses importations de charbon en vue de réduire les émissions de CO2. Néanmoins, le terminal charbonnier, d’une capacité annuelle de 18 millions de tonnes et doté de 46 km d’infrastructures ferroviaires, doit être achevé d’ici à 2023. D’autres installations sont également prévues pour l’exportation d’autres minéraux et de marchandises en général.

Boris Komotsky, membre de la commission parlementaire sur le Développement de l’Extrême-Orient et de l’Arctique, a confié à URA.Ru que la route maritime du Nord est particulièrement importante, car elle permet à la Russie de rester sur son propre territoire pour le transport maritime (évitant ainsi la mer Baltique), ce qui « renforcera la souveraineté russe ».

Mikhail Blinkin, directeur de l’Institut pour l’économie et la politique des transports à l’École supérieure d’économie, est également cité par URA.RU : « Mourmansk deviendra le portail maritime de la Russie. En temps de paix, on se contentait d’en discuter activement, mais dans les conditions de force majeure actuelles, on n’a plus de temps pour discuter. Pour notre pays, ce n’est plus un luxe, mais une nécessité. »

L’extrémité sud de la partie russe de l’INSTC est centrée sur la région de la mer Caspienne. Après de nombreuses années d’indécision, Moscou a décidé d’y reconstruire le canal de navigation Volga-Don d’une longueur de 101 km, reliant la Volga et le Don, et donc la mer Caspienne et la mer Noire. Le projet prévoit le dragage de toute la longueur de la voie navigable jusqu’à une profondeur de 4,5 mètres afin de permettre le passage en toute sécurité de navires plus lourds, pour lequel des entreprises chinoises pourraient être sollicitées.

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