Quelques minutes avant minuit sur l’horloge de la fin du monde

Jamais le danger de guerre nucléaire n’a été aussi grand. Si les dirigeants occidentaux nous assurent que c’est entièrement la faute de la Russie, ils se gardent de dire que le conflit en Ukraine est entré dans une nouvelle phase depuis la mi-septembre, celle d’une guerre directe entre la Russie et l’OTAN (voir AS 38/22). C’est dans ce cadre que le commandant en chef des forces armées ukrainiennes a demandé à l’Alliance occidentale de déployer « l’ensemble de son arsenal » contre la Russie, y compris l’arme nucléaire.

Le 21 septembre, le président Poutine a annoncé une mobilisation « partielle » des forces armées russes, tout en soulignant qu’en cas de menace contre son territoire et son peuple, Moscou « fera usage de tous les systèmes d’armes à [sa] disposition. Ce n’est pas du bluff ». Et de préciser que certaines armes russes sont « plus modernes » que celles de l’OTAN. En même temps, comme on le sait, il a été annoncé que des référendums seraient organisés dans quatre régions d’Ukraine sur leur adhésion à la Fédération de Russie. Si la majorité de la population vote oui, et si le Kremlin accepte effectivement de les intégrer à la Fédération, toute attaque des forces ukrainiennes ou de l’OTAN contre ces régions, comme les dirigeants russes l’ont clairement déclaré, serait considérée comme une attaque contre la Russie elle-même, avec une riposte en conséquence.

Il serait grand temps que l’Occident s’efforce sans compter de parvenir à un règlement négocié du conflit. Mais au contraire, les dirigeants des pays de l’OTAN ont réagi à ces déclarations avec la même arrogance qu’ils accueillent depuis des décennies les revendications et les avertissements de Moscou, les rejetant d’emblée, sans autre considération.

Ainsi, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a qualifié les propos de Poutine de « rhétorique imprudente » et les référendums de « mascarade électorale sans aucune légitimité ». Le président Zelensky, aux ordres de l’OTAN, a affirmé que « Poutine bluffe », tandis que son principal conseiller, Mykhailo Podolyak, déclarait au Guardian que l’Occident devrait lancer des « frappes nucléaires » contre les sites de lancement russes, si Moscou « ne faisait même qu’envisager de procéder à des frappes nucléaires », autrement dit de manière préemptive. À Bruxelles, une présidente de la Commission à bout de menaces réclame plus de sanctions, alors qu’elles se sont avérées inefficaces jusqu’à présent. Appel soutenu par le chef de la politique étrangère, Josep Borrell, convaincu que « Poutine a échoué militairement ». Le président Biden a déclaré à l’ONU que les États-Unis ne respecteraient pas le résultat des référendums, après avoir affirmé sans crainte du ridicule que « personne ne menace la Russie ».

Toutefois, le commandant du commandement stratégique américain, l’amiral Charles Richard, a reconnu que lui et ses collègues étudient actuellement les implications d’un « possible conflit armé direct avec une puissance homologue en termes de capacité nucléaire. (…) Ce n’est plus une question théorique. »

La seule conclusion rationnelle à en tirer, c’est de stopper l’escalade de toute urgence. Si les pays de l’OTAN, avant tout les États-Unis et la Grande-Bretagne, arrêtaient de fournir des armes et des renseignements à leurs mandataires à Kiev, les combats cesseraient très rapidement et des négociations sérieuses pourraient être entamées. C’est le sens de la lettre ouverte que l’Institut Schiller a soumise à l’Assemblée générale des Nations unies, cosignée par la Fondation pour la lutte contre l’injustice. Elle appelle l’ONU à « garantir un débat ouvert et libre sur la nécessité d’établir une nouvelle architecture internationale de sécurité et de développement », qui tienne compte des intérêts légitimes de tous les pays de la planète.

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