Pourquoi tant de mystère autour de la visite d’Olaf Scholz à Washington ?

Le 3 mars, le chancelier allemand s’est rendu à Washington pour une rencontre à huis clos avec le président Biden, qui a duré un peu plus d’une heure. Ce dernier l’a accueilli à la Maison-Blanche par des propos superficiels, le remerciant pour les « changements historiques » qu’il avait opérés « chez lui », notamment l’augmentation des dépenses militaires, l’envoi d’armes à l’Ukraine et des mesures pour briser la dépendance allemande envers l’énergie russe. Olaf Scholz lui a rendu la pareille en termes de platitudes, évoquant l’importance de la « solidarité mondiale » pour défendre Kyiv « aussi longtemps que nécessaire » et de la concertation de leurs actions.

À l’issue de leur entretien, aucune conférence de presse ni déclaration conjointe, laissant la presse spéculer sur les raisons pour lesquelles le chancelier allemand s’était rendu personnellement à Washington pour débiter des clichés. Certains ont suggéré qu’il avait peut-être été question de la politique chinoise, vu l’escalade verbale de l’administration Biden contre Beijing et ses efforts pour obtenir un découplage économique entre l’Europe et la Chine – en dépit des effets négatifs pour les intérêts allemands.

Or, ces spéculations médiatiques ont ignoré les deux « éléphants dans le salon » : les révélations de Seymour Hersh sur la responsabilité de l’administration Biden dans l’explosion des gazoducs Nord Stream, et le rassemblement de plus de 50 000 manifestants à Berlin le 25 février pour protester contre la participation de l’Allemagne et de l’OTAN à la guerre en Ukraine. On y a vu des pancartes demandant à Scholz de s’expliquer sur cette révélation, revendication reprise par certains intervenants.

Une possible explication a été avancée par Ray McGovern, ancien officier de la CIA pendant 27 ans et militant pacifiste, lors de la réunion hebdomadaire de l’Organisation LaRouche du 4 mars. Il s’est dit choqué par le manque d’intérêt des médias pour les discussions entre les deux dirigeants, vu l’importance de leurs décisions, proposant ce qu’il a qualifié ironiquement de « théorie de la conspiration ».

Il a rappelé la conférence de presse du 7 février 2022 au cours de laquelle Joe Biden avait déclaré, en présence d’Olaf Scholz, que si la Russie envahissait l’Ukraine, « il n’y aurait plus de Nord Stream 2. Nous y mettrons fin. (…) Nous serons en mesure de le faire, je vous le promets. »

Dès lors, la visite de Scholz avait peut-être un but autoprotecteur. « Olaf » a peut-être demandé à « Joe » de ne dire à personne qu’il avait été informé de ses projets, de peur de provoquer la chute de son gouvernement de coalition.

Ray McGovern a volontiers admis qu’il s’agissait de pures spéculations, mais il y a aussi une réalité sous-jacente à cette conversation hypothétique. Scholz se trouve dans une position de plus en plus vulnérable, car il a fait de l’Allemagne une partie prenante de la guerre de l’OTAN et s’est allié à un gouvernement américain qui a miné la sécurité énergétique de son pays. Sa réticence à contester ce qui était un acte de guerre pourrait non seulement condamner son gouvernement, mais aussi l’existence de l’OTAN.

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