Olaf Scholz explique, malgré lui, les erreurs de la géopolitique occidentale

Les propos tenus par le chancelier allemand le 15 mai confirment que certains dirigeants de l’UE sont conscients de l’isolement grandissant de l’Europe dans le monde et de la révolte qui gronde dans les pays du Sud. Mais ce même discours, prononcé lors du Global Solutions Summit 2023 à Berlin, montre les limites d’une pensée façonnée par la géopolitique, qui empêche les « élites » européennes de corriger leurs erreurs.

« Le monde unipolaire ou bipolaire du passé était peut-être plus facile à organiser, du moins pour ceux qui détenaient le pouvoir. Mais ce n’est plus le monde dans lequel nous vivons, a affirmé Olaf Scholz. Certains pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique ont des populations et des économies en croissance. Des centaines de millions de personnes dans le monde sont sorties de la pauvreté et ont rejoint la classe moyenne. Ils ont tout à fait le droit d’aspirer au même niveau de prospérité, de participation et d’influence mondiale que celui des citoyens d’Europe et d’Amérique du Nord. C’est ce que doit refléter l’ordre mondial du XXIe siècle. » Le fait que la Chine, l’Inde, le Brésil et le « Sud global » n’aient pas soutenu les résolutions de l’ONU contre la Russie, élaborées par l’Occident, reflète, selon lui, le manque d’attractivité de l’Occident.

Toutefois, le chancelier a tort de croire que les dirigeants auxquels il s’adresse « ne remettent pas en question les principes sous-jacents de notre ordre international ». Aujourd’hui, le principe fondamental de l’ordre occidental est la domination. Il se trompe d’autant plus en recommandant l’Union européenne comme modèle d’intégration économique et politique pour les pays du Sud. En réalité, le modèle de l’UE, fondé sur les prémisses conflictuelles du libre marché, tant au niveau national qu’international, est un échec. Sa politique de « transition verte » (vantée par Scholz) n’est pas seulement illusoire, mais de nature néocoloniale à l’égard des pays du Sud. Cependant, le chancelier propose que la Banque mondiale finance les technologies vertes.

Ainsi, le gouvernement allemand reste fidèle aux institutions mêmes dont, selon Scholz lui-même, les pays du Sud se méfient. Certes, les pays membres de l’UE, dont l’Allemagne, pourraient largement contribuer aux nécessaires changements constructifs de l’ordre économique mondial, mais pour ce faire, ils devront rejeter complètement le paradigme sur lequel repose la géopolitique occidentale.

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