Manifestation de Berlin : le coup d’envoi du nouveau mouvement de la paix

Malgré le barrage d’attaques et de calomnies dans les médias et les grands partis politiques (y compris venant de La Gauche), quelque 50 000 personnes ont répondu à l’appel à manifester le 25 février à la porte de Brandebourg à Berlin — le plus grand rassemblement de ce type depuis le moment fort du mouvement pour la paix au début des années 1980. L’approche adoptée par Sahra Wagenknecht et Alice Schwarzer, les organisatrices du « Soulèvement pour la paix », pour réaliser l’unité au-dessus des partis, a trouvé un écho positif parmi la population. En revanche, les rassemblements anti-guerre organisés selon les lignes partisanes traditionnelles dans d’autres villes allemandes ont été beaucoup plus modestes.

Le « manifeste pour la paix », publié par Wagenknecht et Schwarzer deux semaines avant cette grande manifestation, a recueilli à ce jour plus de 700 000 signatures. Et une semaine avant, le 18 février, quelque 20 000 personnes avaient pris part au rassemblement contre l’OTAN aux abords de la Conférence sur la sécurité de Munich (voir AS 7,8 /23).

Comme Sahra Wagenknecht l’a souligné à Berlin, les cris d’orfraie poussés par les médias et les partis alignés sur l’OTAN reflètent leur crainte de voir se développer l’opposition à la guerre. Ce rassemblement n’est que le premier acte de la résurgence d’un mouvement de masse pour la paix, a-t-elle annoncé, car les citoyens ne soutiennent pas la politique de leur gouvernement — en particulier celle de la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock, qui « se comporte comme un éléphant dans un magasin de porcelaine » et veut écraser la Russie. Chaque allusion à Baerbock de la part des intervenants, ainsi qu’aux « fous de l’armement chez les Verts », déclencha des huées parmi les manifestants.

Autre aspect important, démontant la propagande sur l’héroïsme des combattants ukrainiens « épris de liberté », Sahra Wagenknecht a dénoncé les éléments néo-nazis et extrémistes que l’OTAN utilise dans sa guerre, et qui sont défendus par l’ancien ambassadeur ukrainien en Allemagne et actuel vice-ministre des Affaires étrangères, Andriy Melnyk.

A noter aussi que la veille du rassemblement de Berlin, Wagenknecht avait soutenu les initiatives de paix du Brésil, de la Chine et du Vatican comme autant de repères pour le gouvernement allemand, qui ferait bien d’appuyer ces démarches au lieu de livrer des armes à l’Ukraine et de fantasmer sur la défaite totale et la ruine économique de la Russie.

Le danger que les livraisons d’armes à l’Ukraine conduisent à l’escalade vers une guerre nucléaire entre l’Occident/l’OTAN et la Russie a été abordé par tous les intervenants à Berlin, mais plus particulièrement par le général de brigade Erich Vad (cr), ancien conseiller militaire de la chancelière Angela Merkel. Dans de nombreuses interviews ces derniers mois, il a martelé qu’il n’y a pas de substitut à la diplomatie. L’approche du gouvernement allemand, a-t-il rappelé à Berlin, risque de transformer toute l’Europe en champ de bataille, avec un bilan humain et des ravages bien plus lourds que les dégâts actuels en Ukraine. C’est la première fois depuis des décennies qu’un ancien haut gradé s’exprime publiquement lors d’un rassemblement antiguerre.

Quant au parti La Gauche, si la direction opportuniste continue d’attaquer Wagenknecht (elle-même députée du parti) pour avoir offert une tribune à des gens « de droite », elle a été soutenue par le chef de son groupe parlementaire, Amira Mohamed Ali. En outre, de nombreux membres de la base du parti soutiennent l’initiative. Quant aux Verts, bien que leurs dirigeants comptent parmi les plus fervents partisans de la guerre et de l’OTAN, comme Schwarzer et Wagenknecht l’ont noté, les membres sont de plus en plus nombreux à s’en détourner.

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