L’axe Rome-Berlin à l’origine des sanctions contre la Russie

Selon un article du Financial Times, deux personnes en Europe ont joué un rôle clé dans la décision de geler les réserves de la Banque centrale russe, dès le troisième jour de l’intervention militaire russe en Ukraine : le Premier ministre italien Mario Draghi et le chef de cabinet d’Ursula von der Leyen, Björn Seibert. Le premier a réussi à convaincre un gouvernement américain réticent de prendre une mesure que la Réserve fédérale considérait comme néfaste pour le dollar, tandis que le second avait commencé à élaborer une liste de sanctions dès janvier, bien avant l’éclatement du conflit.

C’est Draghi, affirme l’article du FT, « qui a poussé l’idée de sanctionner la banque centrale lors du sommet d’urgence de l’UE, la nuit de l’invasion. Alors que l’Italie, grande importatrice de gaz russe, avait souvent hésité à adopter des sanctions par le passé, son dirigeant a fait valoir que la Russie pourrait utiliser ses stocks de réserves pour amortir le choc d’autres sanctions, selon un fonctionnaire européen. Pour empêcher cela (…), il faut geler les avoirs, a dit ce fonctionnaire. » Deux jours plus tard, Ursula von der Leyen demanda à Mario Draghi d’exercer sa « magie » sur la secrétaire au Trésor américaine Janet Yellen. À la fin de la journée, il l’avait convaincue.

Cette prétendue « magie » est moins ésotérique qu’on pourrait le croire : il s’agit du pouvoir de la City de Londres et de Wall Street, qu’incarne Mario Draghi, ancien directeur de Goldman Sachs, et qui ne voit aucun problème à torpiller la crédibilité du dollar américain en tant que monnaie de réserve mondiale, pourvu que cela serve la cause de l’Empire britannique.

Pour en revenir à Björn Seibert, il se targue de ses excellentes relations britanniques, étant membre associé du Royal United Services Institute (le plus ancien think-tank outre-Manche) et ancien analyste à l’American Enterprise Institute de Washington. Selon la correspondante du New York Times à Bruxelles, Matina Stevis-Gridneff, Seibert connaît très bien « l’écosystème de la défense américaine ». D’après des sources bien placées, il est « la machine, le cerveau derrière les sanctions de l’Union européenne, et l’agent de coordination avec les États-Unis, le Canada et la Grande-Bretagne ».

Selon Stevis-Gridneff, après avoir « soigneusement, secrètement, méticuleusement » dressé une très longue liste de sanctions, Seibert a ensuite invité les représentants des pays de l’UE à venir en discuter en petits groupes, afin de créer ainsi une certaine dynamique. « Il s’est donc un peu joué d’eux. »

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