La population allemande sommée de « geler pour la liberté »

La pression géopolitique continue à s’intensifier sur l’Europe pour qu’elle suspende toutes ses importations de gaz et de pétrole en provenance de Russie, même au prix d’un cauchemar de blackouts électriques, de fermetures d’entreprises et d’inflation des prix, sans parler du rationnement de la nourriture. Le débat en Allemagne est révélateur.

Le fameux « gourou climatique » Ottmar Edenhofer, de l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact climatique, déclarait ainsi au Rheinische Post : « L’Europe ne peut pas se permettre de continuer à financer la guerre de Poutine par des importations de gaz et de pétrole. Nous pourrions maîtriser un arrêt des importations. » Il reconnaît toutefois que le prix à payer sera élevé, puisque les industries allemandes pourraient être contraintes de fermer leurs portes. « Nous parlons ici de scénarios de temps de guerre. »

Dans le magazine Manager, l’expert en énergie Hanns Koenig avertit de son côté que, du fait que les terminaux méthaniers (permettant de regazéifier le GNL) prévus ne seront pas prêts avant 2026, on risque de voir des « fermetures industrielles imposées par le gouvernement ».

Quant à l’ancien président allemand Joachim Gauck, un russophobe notoire, il a sermonné les Allemands sur la nécessité d’accepter les difficultés : « Nous pouvons aussi nous geler pour la liberté de temps en temps, et aussi accepter d’avoir moins de bonheur et de joie de vivre pendant quelques années. » (Ce que l’ancien pasteur n’a pas dit, c’est que les sacrifices de la population ne seront d’aucune aide pour la liberté, mais serviront plutôt à sauver un ordre mondial en crise.)

En effet, s’il paraît pour l’instant irréaliste d’interrompre tout approvisionnement en gaz russe, les dirigeants allemands tablent depuis longtemps sur une austérité massive, dans le cadre de la « Grande Réinitialisation » concoctée à Davos pour renflouer le système financier occidental en faillite. Ce dessein est désormais reconverti en effort de guerre, se traduisant par un imposant réarmement (l’Allemagne va augmenter de 100 milliards d’euros ses dépenses militaires !), assorti d’une reconversion du secteur énergétique en technologies « renouvelables » à faible densité (voir AS 9/22).

Mais ces mesures risquent de faire long feu. Une réalité que semble avoir entrevu la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock, par ailleurs une fervente partisane de l’indépendance vis-à-vis du gaz russe. Lors d’une conférence de presse le 10 mars au Kosovo, elle a averti qu’en cas de suspension immédiate des importations russes, l’Allemagne et l’Europe se retrouveraient « sans électricité ni chauffage en quelques semaines ».

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