La politique agricole de l’UE contestée

Le 23 mai, la commission de l’Agriculture du Parlement européen a rejeté la loi de l’UE sur la restauration de la nature, et le lendemain, la commission de la Pêche lui emboîta le pas. C’est une bonne nouvelle, car ce texte prévoit de réduire les terres agricoles et les zones de pêche ainsi que de restaurer la faune et les zones humides sous prétexte de « sauver la planète ». Il prévoit notamment de réduire de 50 % l’utilisation des pesticides d’ici 2030. Le ministère américain de l’Agriculture a averti que la politique de la Commission réduirait de 30 % la production alimentaire dans l’UE.

Bien qu’inattendu, le résultat du vote des Commissions s’explique par le changement de position du Parti populaire européen (PPE) de centre-droit, le plus grand groupe siégeant à Strasbourg. Le 31 mai, le PPE a quitté les négociations au sein de la commission de l’Environnement.

« Si la Commission s’intéresse sérieusement à la restauration de la nature, elle devrait présenter au plus tôt une nouvelle proposition », a commenté Christine Schneider, qui dirigeait les négociations pour le PPE. Comme elle l’avait expliqué à Euractiv, certains éléments de la proposition n’avaient, selon elle, aucun sens, notamment l’idée de restaurer les écosystèmes à leur statut historique au lieu d’adopter une approche tournée vers l’avenir, en donnant la priorité à la sécurité alimentaire et à l’accessibilité financière.

Certes, la volte-face du PPE est peut-être due à des considérations électorales. La campagne pour les élections européennes de 2024 a déjà commencé et les politiciens sentent que le vent tourne. La victoire récente aux Pays-Bas d’un parti né de la protestation des agriculteurs (voir AS 12/23), ainsi que la montée de l’AfD en Allemagne montrent que les électeurs sont enclins à sanctionner les partis associés à la politique de l’UE.

Dans toute l’Europe, les associations d’agriculteurs sont sur le pied de guerre et le font savoir. Ainsi, Ettore Prandini, qui dirige le plus grand syndicat agricole italien Coldiretti (1,6 million de membres), n’a pas mâché ses mots, traitant de « malfrat » Frans Timmermans, le premier vice-président de la Commission européenne en charge des politiques du Green Deal. « Derrière la logique de la durabilité, a-t-il dit, Timmermans est en train de démolir le système de production européen. (…) Nous devrions être montrés en exemple, et au lieu de cela, on vient nous dire que les aliments synthétiques sont meilleurs. ».

Les protestations contre la nouvelle loi nous rappellent par ailleurs que les institutions européennes n’ont rien de démocratique. Le Parlement européen, quand bien même il s’oppose à un projet de loi proposé par la Commission, ne peut pas le modifier. Tout au plus peut-il le renvoyer à la Commission en la priant de bien vouloir le réviser. C’est ce qui s’est passé dans le cas présent.

Et qu’a répondu la Commission ? Elle s’est exprimée par la voix de Frans Timmermans, devant la commission de l’Agriculture à Strasbourg : « Il est inutile d’espérer que la Commission présentera une autre [proposition]. La Commission ne présentera pas d’autre proposition. Que ce soit clair comme de l’eau de roche. » Le qualifier de « malfrat » est peut-être un euphémisme…

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