En Allemagne, un manifeste contre la guerre au-dessus des partis

Un vaste mouvement antiguerre se développe dans le monde transatlantique, à l’approche des manifestations et rassemblements de masse prévus pour les week-ends des 18 et 25 février (voir AS 6/23). Les révélations sur le sabotage des gazoducs Nord Stream, combinées à la volonté de l’OTAN de fournir de plus en plus d’armes à Kiev tout en refusant toute voie diplomatique, ont encore sapé la confiance dans les « élites » occidentales. De son côté, le « parti de la guerre » fait tout pour entraver le mouvement en gestation au moyen de la tactique de « diviser pour régner » et de calomnies personnelles.

En Allemagne, pays clé pour l’effort de guerre, un nouveau manifeste contre la guerre et pour des pourparlers de paix sur l’Ukraine vient d’être lancé par Sahra Wagenknecht, la voix la plus populaire de la gauche, et Alice Schwarzer, dirigeante féministe active en politique et éditrice du magazine EMMA. Elles avertissent que « si les combats continuent ainsi, l’Ukraine sera bientôt un pays dépeuplé et détruit. Et beaucoup de gens dans toute l’Europe craignent une expansion de la guerre. Ils craignent pour leur avenir et celui de leurs enfants. » Tout en exprimant leur solidarité avec le peuple ukrainien, elles s’interrogent sur une politique occidentale dont le seul but dans cette guerre est de « vaincre la Russie sur toute la ligne », au risque de « se diriger inexorablement sur une pente glissante vers une guerre mondiale et une guerre nucléaire. Ce ne serait pas la première grande guerre qui commencerait de cette façon. Mais elle pourrait être la dernière. »

Publié le 10 février, le manifeste souligne que « négocier n’est pas capituler. Négocier signifie faire des compromis, des deux côtés. Dans le but d’éviter de nouvelles centaines de milliers de morts et pire encore. C’est ce que nous pensons, c’est ce que pense aussi la moitié de la population allemande. Il est temps de nous écouter ! »

Et plus loin, « Nous, citoyens allemands, ne pouvons pas influencer directement l’Amérique et la Russie ou nos voisins européens. Mais nous pouvons et devons demander à notre gouvernement et au chancelier de rendre des comptes et lui rappeler son serment de ‘protéger le peuple allemand de tout dommage’. Nous appelons le chancelier à arrêter l’escalade des livraisons d’armes. Immédiatement ! Il devrait prendre la tête d’une forte alliance en faveur d’un cessez-le-feu et de négociations de paix, tant au niveau allemand qu’européen. Immédiatement ! Parce que chaque jour perdu coûte jusqu’à 1000 vies supplémentaires — et nous rapproche d’une troisième guerre mondiale. »

Contrairement aux diverses lettres ouvertes rédigées en 2022, ce manifeste compte des signataires de tous bords politiques, dont Rudolf Dressler, ancien secrétaire d’État (SPD), Peter Gauweiler (CSU) et Tino Chrupalla (coprésident de l’AfD). Il est également endossé par Angelika Claußen, vice-présidente de l’IPPNW pour l’Europe, le général Erich Vad (cr), ancien conseiller de la chancelière Merkel, et Justus Frantz, organisateur bien connu de festivals musicaux. Il appelle également à un rassemblement à Berlin le 25 février.

Du côté du gouvernement, la réaction la plus hystérique vient de son plus redoutable faucon, la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock, membre des Verts. « Quel genre de paix a-t-on quand il faut vivre sous l’occupation russe, en craignant chaque jour d’être assassiné de sang-froid, violé, voire même enlevé, si tu es un enfant ? (…) Une paix dictatoriale, à laquelle certains appellent maintenant, n’est pas la paix. Ce serait plutôt l’asservissement de l’Ukraine à la Russie. »

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