Sacs en plastique ou missiles nucléaires : relativiser les menaces

Andrey Kortunov, directeur général du Conseil russe des Affaires internationales, a adressé ce message à la conférence du 10 juin de l’Institut Schiller :

« Il y a soixante ans, John F. Kennedy prononçait son discours historique sur le défi posé par les armes nucléaires. Après la crise des missiles de Cuba, ce défi était en tête de l’ordre du jour politique mondial. Est-ce toujours le cas aujourd’hui ? Non. L’opinion publique internationale ne considère plus la menace d’anéantissement nucléaire comme la préoccupation essentielle éclipsant les autres menaces et problèmes importants. Hommes politiques, chercheurs, journalistes et blogueurs partout sur la planète sont distraits par des questions apparaissant comme plus urgentes et moins compliquées.

« L’opinion publique internationale porte beaucoup plus d’attention aux sacs en plastique qu’aux missiles nucléaires. Le problème des sacs en plastique figure dans les programmes des grands partis politiques. Des projets nationaux et internationaux visant à réduire la production de plastique sont adoptés et mis en œuvre. Le prix des contenants en polyéthylène dans les magasins a fortement augmenté. Des campagnes de sensibilisation sont menées en vue d’améliorer l’élimination des déchets ménagers.

« Malheureusement, on n’observe rien de semblable en ce qui concerne les missiles nucléaires. Au contraire, même les résultats très modestes obtenus en matière de désarmement nucléaire ces 50 dernières années sont en train de se dissiper sous nos yeux. (…)

« Ce n’est pas une raison suffisante pour rester les bras croisés. Le moment d’un nouveau modèle de contrôle des armes nucléaires viendra tôt ou tard : les coûts sont trop élevés et les risques d’un ‘isolationnisme nucléaire’ à venir le sont également. Il est possible de revenir à une nouvelle ère de désarmement nucléaire en empruntant les méthodes utilisées pour traiter les problèmes environnementaux – coopération internationale d’experts, campagnes de sensibilisation du public, implication de stars de la culture pop, lobbying auprès des parlements, etc. Si nous abandonnons les mythes clairement obsolètes et les stéréotypes archaïques qui confèrent à la sphère nucléaire quelque chose de mystique et de sacré, la différence entre les missiles nucléaires et les sacs en plastique ne semblera pas aussi grande qu’on pourrait le penser. »

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